CCF DANS UNE DROLE DE GUERRE — Anccef - Association nationale des conseillers conjugaux et familiaux

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CCF DANS UNE DROLE DE GUERRE

Notre président Macron nous l’a dit l’autre jour : nous sommes en guerre. Beaucoup de voix se sont élevées contre ce terme belliqueux mais personne (à ma connaissance) n’a repris cette expression en y attribuant le qualificatif de « drôle ». Effectivement, les conséquences sanitaires de ce virus n’ont rien de drôle. Celles économiques aussi, mais ça c’est une autre histoire. (cliquer sur le titre pour avoir l'intégralité de cet article)

Pour infos la « drôle de guerre », cela fait référence à la période du début de la Seconde Guerre Mondiale. Car entre la déclaration de guerre du 3 septembre 1939, par le Royaume-Uni et la France à l'Allemagne nazie et l'offensive allemande du 10 mai 1940 sur le théâtre européen du conflit, rien ne s’était passé. Les anglais en parlent comme de la « fausse guerre », les allemands comme de la « guerre assise » et les polonais, de la « guerre étonnante ».

Et nous, comment définissons nous cette drôle de guerre humainement parlant ? Même si, pour certaines personnes, le confinement imposé n’a rien de drôle : vivre tous ensemble, parfois les uns sur les autres, en famille à devoir gérer son télétravail, celui de son conjoint (si on a la chance – ou malchance- de vivre en couple confiné), accompagner ses enfants dans leur travail scolaire, s’organiser pour les tâches domestiques, se préserver des temps individuels,… le tout dans de petits espaces pour certains, il n’y a rien de simple. Mais là encore n’est pas mon propos.

Pour moi cette drôle de guerre me fait vivre ce temps suspendu sur le registre non pas de l’inaction, mais de l’étonnement, du temps pour penser.
Comme il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis et que bien que « au fine je suis assez con », je suis revenue sur mon refus initial de proposer des entretiens pas Skype ou Whatsapp.

Voyant que le confinement durait, je l’ai donc proposé aux patients du début pour qui nous avions fait une annulation simple et aux patients de ces jours ci qui ont répondu présents.

Nous nous sommes donc retrouvés à parler de leur vie privée dans leur environnement privé, certains avec leurs chats qui tournaient autour des écrans, pour une patiente c’était son fils qui rentrait dans sa chambre où la maman s’était confinée pour avoir du réseau en mettant de la musique en bruit de fond, d’autres enfin sirotaient leur coca pendant la conversation, pardon la séance !

Et moi j’étais dans mon bureau-chambre d’amis-bibliothèque, lieu de la cage du lapin, avec mon mur rose et ma déco personnelle, à tenir mon cadre (choix de l’arrière plan flouté sur Skype, porte fermée, chat mis dehors et bol de thé invisible à l’écran). J’ai veillé aux horaires de début et de fin, j’ai pris des notes, on a vu pour un futur rendez vous. Seul le paiement diffère car cela passe par l’envoi de mon RIB pour un virement à venir. Il va juste falloir que je suive ces comptes là !

Est-ce que nos propos ont été plus intimes ? Je ne le pense pas. J’y ai retrouvé à chaque fois l’ambiance que nous pouvions avoir en séance : dans le second degré et l’humour parfois, dans la fatigue, dans l’incertitude, surtout. même l’intensité des échanges y étaient, malgré les écrans.

Avons-nous travaillé ? J’ai souvent eu le sentiment de leur poser des questions. Bien sûr, au début sur comment ils vivent le confinement, puis plus finement sur comment la vie confinée s’organise dans le couple, quels rythmes ont-ils, quels rituels, quels espaces pour s’isoler, penser ou s’ennuyer ?

Mais nous avons pu aussi reprendre le rythme de nos séances et continuer à avancer dans le travail.

A chaque fois je me suis sentie utile, ce qui est pour moi un bon critère d’évaluation. J’ai eu le sentiment de leur offrir une fenêtre sur l’extérieur, un temps pour penser le vécu, pour élaborer sur leur histoire de couple, pour se projeter sur leurs envies, leurs besoins… Donc oui, j’ai contribué à les mettre au travail et à les ouvrir à d’autres pensées que ce sacré confinement.

Pour ceux qui ont différé le rendez-vous, l’explication allait de la gène à parler ainsi par écran interposé ou plus prosaïquement des revenus en baisse donc des priorités à mettre ! Enfin, pour d’autres, se posait la question de fond : comment faire avec les enfants dans l’appartement ! Au-delà de la nécessité de trouver une heure et un espace de libre (pas facile avec des enfants en bas âge), cela vient bien questionner aussi l’intime du couple ! Quelle place lui donner au quotidien ? Quelle priorité donner à son couple dans une vie de famille ? Par temps de confinement en plus ! Vaste sujet de fond sur lequel de nombreux articles sont écrits actuellement.

En tout cas une chose est sure, pour ma part, je ne suis pas pour autant prête à proposer des rendez vous Skype à 21h après l’histoire et le bisou du soir !!!

                                                                                                                                  Bénédicte, ce 9 avril 2020