La loi et le secret professionnel
Articles de loi
Secret professionnel : art 226-13 du code pénal
Modifié par Ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 - art. 3 (V) JORF 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002
La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
Dérogation légale au secret professionnel : article 226-14 code pénal
Modifié par LOI n°2020-936 du 30 juillet 2020 - art. 12
L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :
1° A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;
2° Au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République ou de la cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être, mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles, les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n'est pas nécessaire ;
3° Au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui porte à la connaissance du procureur de la République une information relative à des violences exercées au sein du couple relevant de l'article 132-80 du présent code, lorsqu'il estime en conscience que ces violences mettent la vie de la victime majeure en danger immédiat et que celle-ci n'est pas en mesure de se protéger en raison de la contrainte morale résultant de l'emprise exercée par l'auteur des violences. Le médecin ou le professionnel de santé doit s'efforcer d'obtenir l'accord de la victime majeure ; en cas d'impossibilité d'obtenir cet accord, il doit l'informer du signalement fait au procureur de la République ;
4° Aux professionnels de la santé ou de l'action sociale qui informent le préfet et, à Paris, le préfet de police du caractère dangereux pour elles-mêmes ou pour autrui des personnes qui les consultent et dont ils savent qu'elles détiennent une arme ou qu'elles ont manifesté leur intention d'en acquérir une.
Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut engager la responsabilité civile, pénale ou disciplinaire de son auteur, sauf s'il est établi qu'il n'a pas agi de bonne foi.
Obligation de discrétion : article L311-3 du code de l’action sociale et des familles
Modifié par Ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020 - art. 37
L'exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne prise en charge par des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, lui sont assurés :
1° Le respect de sa dignité, de son intégrité, de sa vie privée, de son intimité, de sa sécurité et de son droit à aller et venir librement ;
2° Sous réserve des pouvoirs reconnus à l'autorité judiciaire et des nécessités liées à la protection des mineurs en danger et des majeurs protégés, le libre choix entre les prestations adaptées qui lui sont offertes soit dans le cadre d'un service à son domicile, soit dans le cadre d'une admission au sein d'un établissement spécialisé ;
3° Une prise en charge et un accompagnement individualisé de qualité favorisant son développement, son autonomie et son insertion, adaptés à son âge et à ses besoins, respectant son consentement éclairé qui doit systématiquement être recherché lorsque la personne est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. A défaut, le consentement de son représentant légal s'il s'agit d'un mineur ou, s'il s'agit d'un majeur faisant l'objet d'une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, de la personne chargée de cette mesure, qui tient compte de l'avis de la personne protégée, doit être recherché ;
4° La confidentialité des informations la concernant ;
5° L'accès à toute information ou document relatif à sa prise en charge, sauf dispositions législatives contraires ;
6° Une information sur ses droits fondamentaux et les protections particulières légales et contractuelles dont elle bénéficie, ainsi que sur les voies de recours à sa disposition ;
7° La participation directe de la personne prise en charge à la conception et à la mise en œuvre du projet d'accueil et d'accompagnement qui la concerne. Cette personne bénéficie de l'aide de son représentant légal, s'il s'agit d'un mineur ou, s'il s'agit d'un majeur faisant l'objet d'une mesure de protection juridique à la personne qui n'est pas apte à exprimer sa volonté, de la personne chargée de cette mesure, qui tient compte de son avis.
Conformément à l’article 46 de l’ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020, ces dispositions entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'Etat et au plus tard le 1er octobre 2020.
Elle est applicable aux mesures de protection juridique en cours au jour de son entrée en vigueur et aux situations dans lesquelles aucune décision n'a été prise au jour de son entrée en vigueur.
Obligation de révélation : article L 226-2 – 1 du code de l’action sociale et des familles
« Sans préjudice des dispositions du II de l'article L. 226-4, les personnes qui mettent en œuvre la politique de protection de l'enfance définie à l'article L. 112-3 ainsi que celles qui lui apportent leur concours transmettent sans délai au président du conseil général ou au responsable désigné par lui, conformément à l'article L. 226-3, toute information préoccupante sur un mineur en danger ou risquant de l'être, au sens de l'article 375 du code civil. Lorsque cette information est couverte par le secret professionnel, sa transmission est assurée dans le respect de l'article L. 226-2-2 du présent code. Cette transmission a pour but de permettre d'évaluer la situation du mineur et de déterminer les actions de protection et d'aide dont ce mineur et sa famille peuvent bénéficier. Sauf intérêt contraire de l'enfant, le père, la mère, toute autre personne exerçant l'autorité parentale ou le tuteur sont préalablement informés de cette transmission, selon des modalités adaptées. » (Article 226-2-1 du code de l'action sociale et des familles)
Commentaires sur le 226-2-1 du code de l'action sociale et des familles
- Ce texte décrit les conditions dans lesquelles une information préoccupante sur un mineur en danger ou risquant de l'être est adressée au Président du Conseil Général ou, par délégation, à ses services.
- Le public concerné par cet article recouvre des professionnels soumis au secret par mission et/ou profession (personnels de l'ASE, assistants de service social, puéricultrices, médecins, etc.) et d'autres qui ne le sont pas. Ainsi, un enseignant peut parfaitement concourir à la protection de l'enfance sans pour autant être soumis au secret professionnel.
- Un débat entre juristes existe sur le caractère obligatoire ou seulement possible de cette transmission.
- Dans une première lecture, le caractère impératif semble évident. L'expression « transmettent sans délai » va dans le sens d'une imposition faîte au professionnel. Cependant, la présence de la phrase « Lorsque cette information est couverte par le secret professionnel, sa transmission est assurée dans le respect de l'article L. 226-2-2 du présent code. » est interprétée par d'autres juristes comme enlevant le caractère obligatoire de la transmission. En effet, comme nous l'avons vu, certains des professionnels concernés sont soumis au secret et d'autres pas. D'où la distinction concernant le cadre juridique s'appliquant à ceux qui le sont.
- Ainsi, Laure DOURGNON et Pierre VERDIER (Le secret professionnel est-il opposable au maire et au président du Conseil général ? », Journal du Droit des Jeunes – Revue d'Action Juridique et Sociale n°284, avril 2009, pages 25-26 ) précisent que « le renvoi à l'article L226-2-2 est particulièrement important : il indique que, si l'information est couverte par le secret professionnel, sa transmission n'est possible que sous les quatre conditions prévues à cet article : c'est une autorisation et non une obligation ; soumise à des conditions précises : évaluer une situation individuelle, déterminer et mettre en œuvre des actions de protection et d'aide ; en se limitant strictement à ce qu'implique la mission de protection ; et après information des personnes concernées (père, mère, enfant). Autrement dit, contrairement à une lecture rapide ou tronquée, la transmission au Président du Conseil Général n'est pas obligatoire pour les personnes participant à la protection de l'enfance, sinon l'incise « lorsque cette information est couverte par le secret professionnel, sa transmission est assurée dans le respect de l'article L.226-2-2 du présent code » n'aurait aucun sens. » .
- Cette seconde lecture nous paraît la plus pertinente. Un professionnel intervenant dans le cadre de la mission d'aide sociale à l'enfance est souvent, avec le soutien de collègues en contact avec la famille, en position d'évaluation de la situation et de détermination des aides nécessaires. Le cadre de l'article L.226-2-2 du CASF est bien suffisant. La seule motivation pour faire une information préoccupante à ce stade, alors que la possibilité de travail avec la famille est suffisante, ne pourrait résider que dans un souci de recensement statistique ou « d'ouverture de parapluie » visant à « se couvrir au cas où... ». L'article L.226-2-1 n'a pas pour vocation de satisfaire ces objectifs. L'information préoccupante peut dans certains cas créer une rupture de confiance, notamment quand un parent vient spontanément demander de l'aide. Cette rupture peut avoir des effets délètère sur la protection de l'enfant qui peuvent être peu protecteurs de l'enfant. Cela serait peu conforme avec l'article L. 112-4 du code de l'action sociale et des familles, créé par la loi du 5 mars 2007, qui stipule que : ‘L’intérêt de l’enfant, la prise en compte de ses besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs ainsi que le respect de ses droits doivent guider toutes décisions le concernant’. "toutes décisions" : donc celle de faire une information préoccupante ou pas ! L'évaluation des effets de l'information préoccupante ne doit jamais être négligée.
- Dans tous les cas, il faut retenir que face à une situation de risque de danger ou de danger, il faut agir. L'information préoccupante, comme l'information d'une autorité judiciaire ou médicale, est simplement une possibilité d'action sans pour autant être toujours la "solution".
- Enfin, le concept « information préoccupante », tout comme celui « intérêt de l'enfant » restent sujets de vastes discussions.